Vladimir Nabokov

NABOKV-L post 0026581, Thu, 29 Oct 2015 08:36:17 +0100

Subject
Re: The name of Lolita
Date
Body
Dear List,

Thank you Brian. In answer to Carolyn's query, you will find here my
annotation in the Pléiade Edition of "Lolita". It contains the quote
from Larbaud (to which Nabokov seems to be referring). I have often
claimed that, in a way, "Lolita" belongs to French literature. The word
"nymphette" is now attributed to Nabokov in some French dictionaries,
though it was used as early as the fifteenth century by French poets,
and later of course by Ronsard (I also quote here my annotation of
"nymphette"). Nabokov wrote "The Enchanter" in France, (though he was
probably wrong when he claimed the experiment on the monkey took place
in Paris), his narrator is a francophone, and French literature is
omnipresent throughout the novel. To say nothing of the fact that the
novel was first published in France. Yet, as I have said elsewhere,
Nabokov couldn't have written it in French, a language much less
flexible and with a more limited vocabulary (but more suave - remember
Nabokov's comment about it), as I have explained in an article published
in the "NRF".

I am too lazy or too busy to translate these texts, sorry! I quote here
an earlier, and longer version of my annotations, before Gallimard asked
me to cut them.

I take this opportunity to mention that my novel "The Real Author of
Lolita" is currently being read by a number of American publishers
(perhaps not the right ones). Any suggestion?


Maurice Couturier

PS:
« Lolita » est le premier et le dernier mot du texte de H.H. Nabokov
s’est expliqué, dans une interview à Playboy en 1964, sur le choix de ce
prénom : « Pour ma nymphette, j’avais besoin d’un diminutif avec une
cadence lyrique. Une des lettres les plus limpides et les plus
lumineuses c’est le ‘L’. Le suffixe ‘ita’ comporte beaucoup de tendresse
latine, et il me fallait cela. D’où Lolita. Cependant, ce prénom ne doit
pas être prononcé comme vous et la plupart des Américains le faites :
low-lee-ta, avec un ‘L’ lourd, pâteux et un ‘o’ long. Non. La première
syllabe doit être comme dans ‘lollipop’ le ‘L’ liquide et délicat, et le
‘lee’ pas trop tranchant. Il va sans dire que les Espagnols et les
Italiens le prononcent avec exactement la note nécessaire d’espièglerie
et de caresse. Une autre considération a été le murmure bienvenu du
nom-source, du nom-fontaine : ces roses et ces larmes dans ‘Dolores’. »
(Intransigeances, p. 35). Lorsque Charlotte appelle sa fille « Lo »,
elle ne peut que prononcer le ‘o’ comme une diphtongue, ce que confirme
d’ailleurs le jeu de mot de sa fille, laquelle, interpellée ainsi,
ajoute ironiquement « and behold », p. 99 (I, 11), en référence au
cliché anglais : « Lo and behold ! » (regarde et contemple). Nabokov
avait-il lu la nouvelle de Lichberg, « Lolita », parue en allemand en
1919 ? Rien ne le dit. Le nom avait déjà été utilisé dans des titres,
notamment en France, comme dans 'En Villégiature. Lolita' (1894)
d’Isidore Gès, 'La Chanson de Lolita' (1920) de René Riche, qui fait
écho au livre où Pierre Louÿs met en scène des nymphettes, 'Chanson de
Bilitis' (1894), ou encore 'Cette saloperie de Lolita' (1953) de Chriss
Frager. Valery Larbaud avait composé une variation sur ce nom dans 'Des
prénoms féminins' (1927) où il dit que l’Espagne « est le mieux outillé
des pays d’Occident, en fait de prénoms. Elle a ces prénoms-gigognes,
pourvus d’un jeu de diminutifs capables d’exprimer toute espèce de
nuances : l’âge, le degré de familiarité dans lequel on est avec les
personnes… Lolita est une petite fille ; Lola est en âge de se marier ;
Dolores a trente ans ; doña Dolores a soixante ans. Ou encore : je me
permets de demander à don José des nouvelles de la jeune veuve, sa sœur,
doña Dolores. Reçu ‘avec toute confiance’, en ami de la maison, je ne
tarde pas à appeler Dolores ? Un jour, inspiré par l’amour, je
murmurerai : Lola. Et, le soir des noces, j’aurai Lolita dans mes bras.
C’est le principe ; mais il y a aussi des formes, et des déformations,
locales : Loliù, Lolin… La gamme entière. » (Valery Larbaud, Œuvres,
Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1958, p. 889).

Nymphet:
Le mot « nymphe » d’où sont dérivés « nymphique, nymphette », est
emprunté au grec numphê, « épousée, jeune fille ou jeune femme en âge
d’être mariée, ou encore belle fille , nom donné aux divinités de rang
inférieur résidant surtout à la campagne près des sources. En outre, le
mot latin a quelques sens métaphoriques : ‘poupée,’, ‘nymphe d’un
insecte’, clitoris’, etc. », explique le Dictionnaire historique de la
langue française. Le mot désigne en français les petites lèvres de la
vulve (« nymphae » en anglais) et non le clitoris. La fiche 88 est toute
consacrée au mot « nymphe » et à ses dérivés ; Nabokov y cite un vers de
John Dyer (1699-1757) tiré du recueil The Ruins of Rome : « Flow’r
bow’rs they seek. Or cool Nymphean groto » (Tonnelles fleuries ils
recherches. Ou grotte nymphéenne »). Il évoque aussi parmi ses sources
Michael Drayton (1563-1631) et Virgil. Tandis qu’il écrivait le scénario
de Lolita pour Stanley Kubrick, Nabokov découvrit un papillon rare, de
la famille des nymphalidés, la nymphe des bois (Lolita, le scénario,
trad. par Maurice et Yvonne Couturier, Paris, Gallimard, 1998, p. 14).
Le mot « nymphette », dont la plupart des dictionnaires français
reconnaissent qu’il a été réintroduit dans la langue française par le
roman de Nabokov, était utilisé en France jusqu’au début du XVIIe
siècle. On le trouve, par exemple, dans Les Amours de Ronsard :
Petite Nymphe folâtre,
Nymphette que j’idolâtre,
Ma mignonne, dont les yeux
Logent mon pis et mon mieux ;
Ma doucette, ma sucrée,
Ma Grâce, ma Cythérée,
Tu me dois pour m’apaiser
Mille fois le jour baiser. (Les Amours, Lausanne, Ed. Rencontres, p.
443).
On s’étonne, cependant, que Nabokov ait pu prétendre que l’utilisation
de ce mot dans le titre d’un film français constituait une violation de
ses droits : « c’est moi qui ai inventé ce terme pour le personnage
principal de mon roman Lolita », dit-il avec une certaine assurance dans
une lettre (Lettres choisies, trad. par Christine Raguet-Bouvard, Paris,
Gallimard, 1989, p. 382). Il connaissait et appréciait pourtant Ronsard
qu’il évoque ailleurs dans le roman ; il disait dans le texte qu’il a lu
à Paris dans les années trente, « Mademoiselle 0 », qu’un seul sonnet de
Ronsard valait mieux que tout le théâtre de Corneille et Racine
(Mademoiselle, p. 31). Peut-être n’avait-il pas rencontré ce poème qui
figure dans « Les amours diverses ». Le mot apparaît déjà chez
l’écrivain anglais Michael Drayton (1563-1631). Il existe un petit roman
anglais, intitulé Nymphet (1915) écrit par J. L. J. Carter et qui
raconte les amours d’un homme pour deux femmes, une femme adulte et une
fillette de douze ans ; cette dernière facilitera finalement les
relations entre les deux adultes. Emma, la fille du directeur de la
prison dans Invitation au supplice, est la première véritable nymphette
dans l’œuvre nabokovienne, suivie de peu par la fillette anonyme de
L’Enchanteur ; cependant, plusieurs autres personnages préfigurent
Lolita, comme Machenka dans le premier roman, Sonia dans L’Exploit,
Margot dans Rire dans la nuit, Mariette dans Brisure à senestre, de
sorte que l’on peut prétendre que la nymphette constitue le « mythe
personnel » de Nabokov. (Voir Maurice Couturier, « Les scansions du
mythe », in "Lolita", Paris, Autrement, Coll. Figures Mythiques, 1998).

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